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Amor y Control est une Salsa écrite et composée par Rubén Blades. Elle a été enregistrée en 1992 dans l’album éponyme du chanteur en 1992. Son texte est très représentative de l’œuvre de Ruben Blades pour quatre raisons principales :

Par son thème : la chanson décrit un fait du quotidien, un petit drame intime ancré dans la réalité sociale contemporaine de l’Amérique latine. Ici, c’est un père qui morigène son fils au mauvais comportement ; dans Decisiones, c’est l’anxiété d’une jeune fille enceinte et un accident de voiture provoqué par l’alcool ; dans Juan Pachanga, c’est un viveur qui cherche à s’étourdir pour oublier une déception amoureuse. Chanson après chanson, l’auteur construit ainsi, par petits touches successives, une grande fresque de la comédie humaine latino, à partir de personnages et de situations a priori relativement banals.

Par son style narratif : le texte est autant conçu comme une petite nouvelle que comme un poème. L’auteur décrit en quelques mots les personnages, les met en situation, décrit leur sentiments instantanés et surtout leurs actes et les événements auxquels ils sont subitement confrontés. Bien souvent, l’histoire a un début et une fin, même si celle-ci n’est pas toujours totalement conclusive, laissant ouverte la possibilité d’une suite (on pourrait presque dire : d’un prochain épisode). La jeune fille enceinte n’a pas encore pris la décision d’avorter ; le mari jaloux guette le voisin qui veut coucher avec sa femme pour lui donner une bonne raclée ; un jeune éméché provoque un accident de voiture mortel. D’autres chansons de Ruben Blades, comme Pedro Navajo, vont encore plus dans cette « scénarisation » : nous les écoutons à la manière dont nous lirions un roman policier, tenus en haleine par le déroulement de l’intrigue.

Par son mode d’écriture : la chanson n’est pas conçue selon les normes traditionnelles de la poésie, avec vers, pieds, rimes, couplets et refrains : elle prend plutôt la forme d’un récit libre, où l’auteur nous raconte simplement, comme s’il est assis avec nous autour d’un café, la scène à laquelle il vient d’assister et l’émotion qu’elle a provoquée en lui[1]. Par exemple, dans Amor y control, Rubén Blades s’exprime à la fois comme observateur (il décrit la famille qui passe devant lui) et comme sujet (il vient de rendre visite à sa propre mère malade). Cette écriture dans le style direct du langage parlé, qui donne au discours un ton d’authenticité en l’éloignant de la rigidité des conventions littéraires, se retrouve dans d’autres chansons de Blades, comme par exemple certains passages de Chica plastica.

Par sa tonalité moralisatrice : Rubén Blades tire fréquemment à la fin de ses chansons une morale des événements auxquels il assiste. En particulier, il insiste souvent, comme il le fait dans Amor y control, sur l’importance des valeurs de solidarité et d’amour familial. Dans d’autres chansons, comme Chica Plastica, le ton se fait plus politique, avec des appels à l’unité du continent sud-américain pour résister à l’impérialisme culturel de son grand voisin du nord.

Fabrice Hatem

 

Ses interprétations par Ruben Blades

Dans le clip basé sur le CD Amor y control

En concert « live » à Mexico en 2009

Ses paroles en espagnol[2]

Sa traduction en français

Amor y control
(Rubén Blades)

Saliendo del hospital,
Después de ver a mi mamá,
Luchando contra un cáncer
Que no se puede curar,
Ví pasar a una familia.
Al frente iba un señor de edad,
Una doña, dos muchachas
Y varias personas más.
De la mano del señor un hombre joven caminaba,
Cabizbajo y luciendo arrepentido.
El era la causa de una discusión familiar,
De la que nos enteramos
Al oir al señor gritar :
« Aunque tú seas un ladrón,
Y aunque no tengas razón,
Tenemos la obligación de socorrerte.
Y por más drogas que uses,
Y por más que nos abuses,
La familia y yo tenemos que atenderte.
Sólo quien tiene hijos entiende
Que el deber de un padre no acaba jamás.
Que el amor de padre y madre
No se cansa de entregar.
Que deseamos para ustedes
Lo que nunca hemos tenido.
Que a pesar de los problemas,
Familia es familia
Y cariño es cariño. »

Ohhh ohhh ohhh

Los ví marcharse con su llanto,
Su laberinto enfrentando,
En la buena y en la mala juntos, caminando.
Y pensé mucho en mi familia,
Los quise tanto aquel momento
Que sentí que me ahogaba en sentimiento.
Aquel muchacho y mi pobre madre:
Dos personas distintas,
Pero dos tragedias iguales.

Cuánto control y cuánto amor
Tiene que haber en una casa!
Mucho control y mucho amor,
Para enfrentar a la desgracia

Por más discusiones que haya dentro de tu casa,
Por más que creas que tu amor es causa perdida
Ten la seguridad de que ellos te queren,
Y que ese cariño dura toda la vida.

Cuánto control y cuánto amor
Tiene que haber en una casa!
Mucho control y mucho amor,
Para enfrentar a la desgracia.

Mantén amor y con gracia enfrente la pena,
Combinando la esperanza y el sentimiento.
Dando la espalda no se van los problemas
Ni la impaciencia resuelve los sufrimientos.

Cuánto control y cuánto amor
Tiene que haber en una casa!
Mucho control y mucho amor,
Para enfrentar a la desgracia.

Amour et contrôle
(Traduction de Fabrice Hatem)

Sortant de l’hôpital,
Après une visite à ma mère,
Luttant contre un cancer
Qui ne peut se soigner,
Je vis passer une famille
Devant marchait un monsieur assez âgé,
Puis une dame, deux jeunes filles
Et quelques autres personnes.
A côté du monsieur, marchait un homme jeune,
La tête basse et paraissant se repentir
Il était la cause d’une discussion familiale,
Au cours de laquelle
Nous entendîmes le monsieur crier :
« Bien que tu sois un voleur,
Et bien que tu aies perdu la raison,
Nous avons l’obligation de te secourir.
Et bien que soies un drogué,
Et bien que tu abuses de nous,
La famille et moi nous devons te secourir.
Seulement celui qui a des enfants comprend
Que le devoir d’un père ne se termine jamais.
Que l’amour d’un père et d’une mère
Ne se fatigue jamais de se donner
Que nous désirons pour vous
Ce que nous n’avons jamais eu nous-mêmes.
Que, malgré tous les problèmes,
La famille est la famille
Et la tendresse est la tendresse ».

Ohhh ohhh ohhh

Je les vis s’éloigner en marchant, avec leur plainte,
vers le labyrinthe qu’ils affrontaient,
Unis dans le bonheur comme dans le malheur,
Et je pensais beaucoup à ma famille,
Je les aimais tant à ce moment-là
Que je me sentis presque submergé par l’émotion.
Ce gamin et ma pauvre mère :
Deux personnes distinctes,
Mais deux tragédies comparables.

Combien d’amour et combien de contrôle
Il faut avoir dans une maison !
Beaucoup de contrôle et beaucoup d’amour
Pour affronter le malheur.

Malgré toutes les disputes qu’il y a à la maison
Même si tu crois que tu amour est une cause perdue
Tu as la sécurité que ce que les tiens t’aiment
Et de cet amour qui dure toute la vie.

Combien d’amour et combien de contrôle
Il faut avoir dans une maison !
Beaucoup de contrôle et beaucoup d’amour
Pour affronter le malheur.

Cultive l’amour et affronte la peine avec courage
En combinant l’espérance et le sentiment
Tourner le dos ne fait pas disparaître les problèmes
Et l’impatience ne calme pas la souffrance.

Combien d’amour et combien de contrôle
Il faut avoir dans une maison !
Beaucoup de contrôle et beaucoup d’amour
Pour affronter le malheur.

Références complémentaires

Une biographie en français de Ruben Blades

Une biographie en anglais de Ruben Blades

Une discographie en français de Ruben Blades

Une discographie très complète (en espagnol) de Rubén Blades

Un site très complet consacré à Rubén Blades

Une analyse des personnages des chansons de Rubén Blades

Une autre fiche technique sur Amor y control


[1] Bien sûr cette apparente simplicité masque une virtuosité réelle d’écriture, car il faut bien faire « coller » paroles et musique. Mais celle-ci, loin d’être mise en avant, comme souvent dans l’écriture poétique, est au contraire ici masquée sous l’apparent naturel du style direct.
[2] Le texte est basé sur la version du clip vidéo proposé en lien. Les parties interprétées par le chœur figurent en italiques.