« La danse, c’est la vie» : un entretien avec Johnson Mayet
Pour consulter cet entretien, cliquez sur le lien suivant : Johnson
Pour consulter cet entretien, cliquez sur le lien suivant : Johnson
Manuel José Denis Martinez est une valeur importante de la Timba cubaine et plus généralement de la Salsa. Ce musicien au talent multiforme a en effet été rien moins que membre fondateur du Trabuco de Manolito Simonet, chanteur du groupe Klimax et du Afro-Cuban All Stars, et compositeur de nombreux thèmes interprétés par les chanteurs les plus célèbres comme Gilberto Santa Rosa. Il a également collaboré avec Pancho Amat, Diego Peláez et Willy Rosario.
Mais c’est en tant que directeur et chanteur de son propre groupe Denis y su Swing qu’il est venu donner un concert au Festival Latinossegor d’août 2013.
Cet orchestre nous propose une salsa romantique aux irisations très variées, allant du Cha Cha Cha au Mambo en passant par la Cumbia et le Rap. Son récent thème El Drama donne une assez bonne idée de cet éclectisme stylistique.
Mais j’ai surtout découvert en la personne de son animateur principal, Denis,une « bête de scène » à l’énergie impressionnante, capable de soulever progressivement d’enthousiasme une foule initialement placidede plusieurs milliers de personnes.
http://www.youtube.com/watch?v=SWxahm9QD7s Ce n’est cependant pas sur une scène de spectacle que j’ai vu Denis pour la première fois, mais au bord de la piscine de l’hôtel d’Hossegor où nous résidions tous les deux. J’étais en train de rôder dans les lieux, à l’affut de quelques images d’ambiance pour le reportage que je préparais pour le festival Latinossegor. En passant devant la piscine, je vis dans l’eau un homme assez corpulent, à la peau couleur café au lait, au visage rond et jovial, barbotant joyeusement en aspergeant assez généreusement les alentours. Pensant qu’il agissait de l’un des musiciens des orchestres qui jouaient ce soir-là, je braquais sur lui ma caméra pour tourner quelques images. Ce que voyant, il commença à me faire de grands signes et à barboter de plus belle. Visiblement très heureux d’être l’objet de mon attention cinématographique, il riait à gorge déployée tout en échangeant quelques plaisanteries avec un autre chanteur cubain, Moreno Chembele, accompagné de son épouse.
Je venais de faire la connaissance du chanteur et compositeur Manuel José Denis Martinez, dit Denis.
L’étape suivante de ma rencontre avec ce personnage à la fois chaleureux, extraverti et hypersensible, se déroula sur la scène du concert, sur la place des Landais d’Hossegor, une jolie place rectangulaire entourée de petites terrasses de restaurant où l’on peut déjeuner agréablement face à la plage – celle-là même où se déroulent en automne des compétitions mondiales de surf.
Avec Denis et son hyperactivité permanente, la scène de répétition se transforma ce jour-là en une sorte de jam session improvisée entre amis : Denis, dans son rôle de maître de céans, allait, omniprésent, d’un musicien à l’autre, réglant ici un micro, essayant là un instrument –car il joue d’à peu près tout – discutant de la position d’un micro avec les techniciens… Un mélange d’homme-orchestre et d’ouragan.
Mais je ne l’avais pas encore entendu chanter !!! Comme l’orchestre jouait déjà depuis une bonne demi-heure, la balance ressemblant de plus en plus à une jam session improvisée par son enthousiaste directeur, la foule des vacanciers commença à s’agglutiner autour de l’estrade pour écouter et prendre quelques photos. Denis, visiblement ravi d’avoir devant lui un public, commença alors à chanter pour eux, oubliant visiblement qu’il était simplement en train de répéter. Comme les gens s’approchaient de plus en plus nombreux, Il commença à s’adresser à eux, leur demandant ce qu’il voudrait entendre et interprétant pour eux quelques notes de leur chanson favorite. Avec son public improvisé, il semblait vraiment nager dans le bonheur, heureux de leur donner du plaisir et de partager avec eux tout en étant au centre de leur attention – une bande d’amis joyeux tournés vers lui comme le tournesol vers le soleil. Tout le monde était ravi et moi le premier. Mais lorsqu’il me vit filmer la scène, ce fut pour lui comme une poussée d’adrénaline supplémentaire. II se mit alors à sourire, chanter et danser devant la caméra.
Mais Denis sait aussi faire preuve d’une chaleureuse sollicitude pour ceux qu’il a choisis pour amis. Un moment indisposé par la chaleur, je m’étais en effet étendu, à l’arrière de la scène, sur une grande caisse de matériel. Remarquant que je n’étais plus à ses côtés, il vint prendre – marque d’intérêt qui me toucha beaucoup – de mes nouvelles. Et il le fit avec tant de jovialité et de bonne humeur que j’éclatais d’un rire amical tout en lui disant : « el periodista esta cansado », « le journaliste est fatigué ». Lui-même éclata alors de rire en faisant passer l’information à la cantonade, musiciens et public inclus, avec une sorte de jubilation enfantine : « el periodista esta cansado !! », « el periodista esta cansado !!». Puis il revient vers moi, me serra dans ses bras et commença à me chanter… une berceuse sur le même thème, tout en ajustant, pour me procurer un meilleur confort, le petit sac à dos que j’avais mis derrière ma tête en guise d’oreiller. Venant d’une gloire de la Timba cubaine, j’étais évidemment très touché par de telles marques d’attention…
Il s’en est finalement fallu de très peu, me semble-t-il, pour qu’il ne commence à improviser un embryon de chanson sur cette phrase…. Enfin, si l’été prochain, vous entendez une nouvelle Salsa intitulée « El periodista esta cansado » et composée par Denis, vous saurez comment lui est venue l’inspiration… Car, comme vous l’apprendrez peut-être en lisant l’entretien qu’il m’a accordé, Denis n’est pas seulement chanteur et directeur d’orchestre, mais aussi – et peut-être surtout – compositeur…
Le reste de l’après-midi se passa autour de la piscine, où les musiciens avaient amené quelques bouteilles de rhum « 7 años », que nous partageâmes en frères… Moins aguerri que mes amis cubains, c’est donc la tête un peu lourde et la démarche légèrement titubante que je me rendis place des Landais pour filmer le concert de Denis y su Swing après l’avoir dûment interviewé.
Ce qui m’impressionna le plus, durant la soirée, fut la très forte présence scénique de Denis et sa capacité à instiller progressivement un enthousiasme collectif dans une foule de plusieurs milliers de personnes au départ relativement calme. Essayons d’en détailler la recette :
– Une formation à l’énergie rythmique communicative, dont le directeur sait mettre en valeur les interprètes en les invitant à des improvisations solos, tout en faisant preuve lui-même d’une impressionnante vitalité.
– Un meneur de jeu généreux qui aime partager la scène avec d’autres artistes invités – comme ce soir-là chanteur Moreno Chembele (photo ci-contre) et la jeune chanteuse Orielis Mayer Lugo (photo ci-dessous).
– Un sens instinctif de la communication avec le public, qu’il sait interpeler, stimuler en reprenant un thème connu comme Guantanamera ou Chan Chan, associer à son jeu de scène en invitant les meilleurs danseurs à venir le rejoindre sur scène pour un petit spectacle improvisé, ou encore en prenant un enfant dans ses bras pour chanter avec lui.
– Enfin, un talent artistique multiforme. Car Denis est à la fois compositeur (un grande partie des thèmes qu’il interpréta ce soir-là étaient de lui), arrangeur (les vieux thèmes comme Guantanamera ou Chan Chan sont « relookés Timba » par lui de manière très convaincante) et chanteur improvisateur (Denis semble capable de bien chanter n’importe quoi, n’importe où et avec n’importe qui). Ajoutons à cette liste déjà longue qu’il est capable de jouer un nombre impressionnant d’instruments (Piano, congas, guitare…)
Bref, avec Denis en meneur de jeu, la scène devient un lieu de fête partagée et improvisée.
Cela se fait-il au détriment de la rigueur et de la clarté musicale ? A chacun de se faire une opinion. En tout cas, j’ai pour ma part passé un excellent moment, surtout pendant la première partie du concert où l’extraordinaire énergie musicale de Denis était parfaitement contrôlée (pour revivre quelques thèmes de ce concert, cliquez sur les liens internet en bas de l’article).
Mais juste avant le concert, Denis avait eu l’amabilité de répondre à quelques-unes de mes questions.
Je vous livre ici le contenu de cet entretien, où il égrené quelques-uns des plus chers souvenirs de sa riche carrière musicale.
Manolito Simonet y su Trabuco
Denis a été membre fondateur en 1992 du groupe Manolito Simonet y su Trabuco, avec lequel il a mené pendant plusieurs années une intense activité musicale. Il m’a expliqué les circonstances de son entrée dans l’orchestre. « Je connaissais Manolito depuis longtemps. Lorsque j’avais 14 ans, il était directeur du groupe Maravilla de Florida. Ils sont venus donner un concert dans ma ville natale, Ciego de Ávila,dans la région de Camaguey. Je regardais l’orchestre, très enthousiaste. Tout à coup, je suis monté sur la scène et j’ai dit à un musicien que je voulais chanter. Manolito m’a regardé et a dit : « Fait chanter le petit ». J’ai commencé à chanter. Quand je suis sur la scène, je deviens une autre personne, je suis complètement en transe. Les musiciens me regardaient et semblaient se dire : « Comment est-il possible qu’un gamin de cet âge puisse avoir l’expérience d’un artiste confirmé ? ». A la fin du concert, Manolito m’a dit : « Quand tu seras grand, tu vas travailler avec moi. »
« Dix ans après, j’habitais La Havane où j’étais arrivé en 1992. Je me suis présenté à Manolito qui était en train de fonder son orchestre Manolito y su Trabuco. Il m’a dit : « tu es le petit gars qui a chanté il y a dix ans à mon concert à Cienfuegos. Ce n’est pas la peine de faire un essai. Tu peux chanter avec moi. ».» J’ai commencé à chanter avec eux dès la fondation du groupe. Ils ont aussi mis à leur répertoire des compositions de moi, comme Guiro, Calabaza y Miel. Cela a été une période musicalement très intense. »
Le groupe KIimax
En 1995, Denis a participé à la fondation du groupe Klimax de Giraldo Piloto, où il a été à la fois chanteur principal et compositeur. Il a enregistré deux CD avec cet orchestre Mira si te gusta et Juego de Manos, réalisant de nombreuses tournées internationales qui lui ont visiblement laissé un souvenir très intense.
« Klimax été l’orchestre où j’ai pu me développer comme compositeur et chanteur et où j’ai pu m’intégrer à la nouvelle génération de la musique populaire cubaine, dont Giraldo Piloto est selon moi l’un des plus grands représentants vivants. Lorsque je suis venu le voir pour la première fois j’avais eu un accident et j’étais en chaise roulante. Lui était déjà connu et jouait dans plein d’endroits comme le Tropicana. Il m’a demandé ce que je voulais et je lui ai répondu que je souhaitais chanter avec lui. Il a alors décidé de me faire passer un test. Il m’a dit : « je vais te faire écouter une chanson et il faut que tu la chantes. Combien de temps te faut-il pour la chanter ? » Je lui ai répondu : « dix minutes », car j’ai une grande mémoire musicale. Il me regarde, un peu surpris, me donne un disque avec trois thèmes et me conduit dans une chambre. J’ai écoute les chansons une fois. Il revient au bout de dix minutes et me dit de chanter la chanson. Je le fais, et il me regarde encore avec surprise, puis me dit : « C’est ok, je te prends dans mon orchestre, mais le premier concert est dans un mois. Est-ce que tu peux le faire ? Je lui dis qui oui. J’ai fais les essais en chaise roulante et, par un gros effort de volonté, j’étais sur pieds pour le concert. C’est ainsi qu’a commencé mon histoire avec Klimax. » « Avec ce groupe, j’ai fréquenté de grands noms de la musique mondiale comme Celia Cruz, Willie Colon… Je me souviens en particulier d’un concert en Hollande vers 97-98 lors d’un festival où participaient également Ray Charles, Winton Marsalis, Earth Wind and Fire, Al Jarreau, Herbie Hancock. Ils m’ont demandé de chanter avec eux pour la descarga finale. Ils m’ont dit : « Chante ce que tu veux.». C’est ainsi que j’ai chanté Guantanamera avec tous ces grands artistes. »
L’Afro-Cuban All Stars
Denis a participé, en tant que choriste à l’aventure des Afro-Cuban All Stars (phto ci-contre) et à celle du Buena Vista Social club qui l’a suivi. Il m’a raconté la manière dont les choses se sont passées. « C’était vers 1998-1999. Juan de Marcos m’a appelé par téléphone. J’étais déjà à la Havane. Il me dit : « On m’a dit beaucoup de bien de toi. Viens au studio de l’Egrem ». C’est là que j’ai rencontré Omara Portuondo, Ibrahim Ferrer, Ruben Gonzales, Ry Cooder. Ry a amené une bouteille de Johnny Walker et m’a dit : « est-ce que tu peux chante une chanson ? » Je lui ai répondu : « je peux chanter ce que tu veux ». Il me dit : « Rentre dans le studio ». Je commence à chanter le premier des thèmes et tous les vieux étaient très enthousiastes. Ils se sont mis à rigoler en disant : « tu es notre père à tous ».Ry m’a regardé et m’a dit : « tous les autres sont vieux et toi tu es jeune, tu es un gosse. Mais tu peux entrer dans le groupe puisque ce sont tes enfants. » C’est ainsi qu’a commencé pour moi toute l’histoire du Buena Vista Social Club, où j’étais chanteur choriste et qui a gagné en 1998 un Latin Grammy avec son CD. Simultanément, je continuais à animer mon propre orchestre Denis y Su Swing. »
Denis y su Swing
Denis a en effet fondé son propre orchestre, Denis y su Swing, en 1998. Il va enregistrer avec lui plusieurs album au cours des quinze années suivantes, comme « Nunca Pescao, siempre Tiburón » au début des années 2000, et Son de Cristal en 2006.
L’orchestre possède un répertoire très large : musique cubaine, internationale; Cha Cha Cha, Mambo, Cumbia, Rap, etc. » Dans les concerts de mon orchestre, comme celui de ce soir au festival d’Hossegor, j’associe deux types de répertoires : d’une part, des « standards » réarrangés par moi, comme les chansons du Buena Vista Social Club, ou encore La Engañadora, Un monton de estrellas, Che commandante, Guantanamera… Et d’autre part, mes propres compositions comme El Bonbon, El Drama, El ventilador de la Havana, Préguntame como Estoy ou Comigo no se puede. »
Le compositeur Denis, en effet, n’est pas seulement chanteur, mais aussi compositeur. Avec un grand succès d’ailleurs, puisque plusieurs de ses thèmes ont été interprétés par des grandes vedettes internationales de la Salsa comme Gilberto Santa Rosa. « Une grande partie du répertoire de mon propre orchestre est composé de mes chansons. J’aime inventer des thèmes que les gens vont chanter et danser. Pendant quelques temps, au début des années 2000, j’ai même arrêté de chanté et je me suis un peu enfermé chez moi pour composer. C’était pour moi comme une lutte intérieure, comme un défi de voir mes œuvres adoptées par le public. Pendant cette période, en 2002, j’ai enregistré un disque de House Music, dont tous les thèmes sont de ma composition et comportant un hommage à Perez Prado, qui a connu un beau succès Puis un jour le musicien Roberto Carcacesse m’a dit : « c’est un crime si tu ne chantes pas, retourne chanter, mon frère. ». J’ai alors recommencé à chanter et, depuis, je ne me suis plus arrêté. »
« Actuellement, je prépare avec mon orchestre un nouveau CD intitulé« Contra el olvido. ». C’est un hommage à des artistes représentatifs de la musique cubaine et latino comme Manu Bravo, Julio Iglesias. Il y aura des chanteurs invités comme El Canario, Antonio Carmona…. «
Si vous apprenez que Denis y su Swing passent à côté de chez vous à l’occasion d’un prochaine tournée en Europe, n’hésitez pas : vous passerez avec eux un moment festif et agréable.
Nb : Certains des photos du groupe Klimax, et du Trabuco de Manolito Simonet figurant dans cet articles ont été reproduites de www.montunocubano.com/, site de référence sur les musiques populaires cubaines. Pour écouter quelques thèmes du concert d’Hossegor le 31 août dernier :
Un monton de Estrellas
https://www.youtube.com/watch?v=pUnqfpj_eTE
Preguntame como estoy
https://www.youtube.com/watch?v=b6ljCBHmYMM
Pour savoir et écouter davantage sur Denis :
https://www.facebook.com/pages/Manuel-Denis-Swing/440734882676433
En guise d’introduction…
Installé à Bruxelles depuis 2003, le tresero et chanteur Rey Cabrera est aujourd’hui l’un des représentants les plus éminents de la tradition musicale populaire de Santiago de Cuba. C’est un plaisir immense de l’écouter jouer le Son avec son Septet Rey Cabrera y Sus Amigos. Ces excellents artistes interprètent, avec talent et sans chichis, un répertoire composé de thèmes à la facture simple et forte, souvent composés par Rey lui-même. Une musique merveilleusement propice à la danse, mais que l’on peut aussi goûter en mélomane, tranquillement assis devant un mojito.
Mais Rey Cabrera est aussi une mémoire vivante de l’histoire du Son Santiaguero aux cours de la seconde moitié du XXème siècle. Né comme cette musique dans les collines des alentours de la ville, il a commencé très jeune tôt sa carrière comme musicien de rue en duo avec… Eliades Ochoa, avant de donner vie, pendant plusieurs décennies de travail artistique à Cuba, à la musique populaire sous toutes ses formes : émissions de radio et de télévision, concerts et descargas en compagnie des nombreux groupes auxquels il a participé dans les différents lieux de spectacles de Santiago – au premier rang desquels la fameuse Casa de la Trova…
Il a bien voulu égrener pour nous ces riches souvenirs, bourré d’anecdotes souvent drôles, toujours pleines d’enseignements sur la vie quotidienne des artistes cubains et sur l’histoire de la musique populaire. Cela pourrait fournir la trame d’un véritable roman, dont les péripéties rappellent celle des fameux musiciens du Buena Vista Social Club – un groupe dont il aurait pu de toute évidence faire partie.
Je vous propose de découvrir ce témoignage, enrichi par des captations réalisées lors du concert donné par Rey aux Hangar d’Ivry le 14 juin dernier, dans l’article suivant. Vous y découvrez également une présentation de son dernier CD, Controversia, révélé au public lors d’un concert à Bruges le 5 octobre dernier, et qui s’inscrit comme le reste de l’œuvre de Rey dans la tradition du meilleur Son cubain.
Rey Cabrera : L’histoire du Son au bout des doigts
La vitalité spontanée, le jaillissement multiforme de la culture populaire cubaine m’ont toujours fasciné. Là-bas, le talent artistique peut naître et grandir dans le quartier le plus déshérité, dans le village le plus reculé, dans la maison la plus modeste, comme une vigoureuse semence d’arbre tropical qui bientôt dépasse la taille humaine pour lancer ses feuillages vers le ciel. La densité en est telle que, dans certains quartiers de la Havane de Santiago, chaque pierre semble cacher un artiste. La musique et la danse jaillissent, vivantes et pures, de chaque cour, de chaque fenêtre, de chaque place, de chaque jardin public…
Une scène du film « Buena Vista Social Club » illustre à mes yeux, de manière particulièrement émouvante, cette vitalité. On y voit Eliades Ochoa, marchant, sa guitare à la main et son éternel chapeau de cow-boy sur la tête, dans ce qui semble être une gare de triage ou un dépôt de vieux trains désaffectés (ce qui, à Cuba, revient un peu au même). Il évoque ses débuts de musicien lorsque, encore enfant, il allait jouer dans les rues du port de Santiago, qui était aussi le « quartier chaud » de la ville, pour recueillir quelques pièces de monnaie.
Vivante à jamais dans mon cœur, cette scène présentait cependant pour moi le caractère d’un mythe. Il s’agissait forcément d’un passé hors d’atteinte, dont je ne pourrais jamais que rêver sans pouvoir le rencontrer réellement. Les vieux musiciens étaient morts, les bordels de Santiago étaient fermés depuis longtemps et plus aucun bateau ne déchargeait plus dans le port sa cargaison de marins en goguette… Tout cela était donc définitivement rangé sur les étagères de la mémoire, derrière une transparente mais infranchissable paroi de verre….
Et puis, un soir de juin 2013, j’ai assisté, dans la salle du Hangar d’Ivry, à un concert du vieux tresero Rey Cabrera et de son Septet de Son. Sa voix et des doigts ressuscitèrent alors pour moi ce que le Son Santiaguero avait de plus vivant, rythmé et amical dans sa vigoureuse simplicité qui fait vibrer les coeurs. J’ai alors voulu en savoir davantage sur lui. J’ai interviewé ce musicien. Et brusquement; sans crier gare, a resurgi devant le monde évoqué par Eliades Ochoa – mais pas cette fois sur une inaccessible toile de cinéma : bien vivant, en chair et en os, conté par une voix proche, amicale et chaleureuse.
C’était dans les années 1950, un peu avant le début de la dictature castriste…
Mais n’anticipons pas, et parlons tout d’abord du concert de juin 2013.
C’est sur le conseil de Dj Pascualito je me rendis ce soir-là, avec Salsero Loco Volante Olivier, au concert du Septet Rey Cabrera y Sus Amigos. Il s’agit d’une formation de Son assez traditionnelle avec deux chanteurs (Rey Cabrera au tres accompagné d’une seconde voix aux percussions mineures), un trompettiste, un pianiste, un bongocero, un conguero, et un bassiste. Tous excellents, notamment le pianiste, le trompettiste et Rey Cabrera au tres (voir la liste des musiciens en fin d’article).
Situé sur un terrain très dégagé, juste derrière la mairie, le Hangar d’Ivry est une salle de spectacle installée, comme son nom l’indique, sur les lieux d’un ancien hangar. Si le bâtiment, rectangulaire et longiligne, ne paye pas vraiment de mine de l’extérieur, il abrite une salle moderne et bien aménagée, beaucoup plus longue que large. La piste de danse, où le public se presse debout les soirs de concerts, est assez étroite, un peu coincée entre la scène et la guérite de mixage, qui trône sur une sorte de mezzanine le long du mur faisant face à la piste.
Cette disposition a priori un peu étrange – on a le nez littéralement collé sur la scène – possède un mérite immense, celui de créer une très forte proximité entre les artistes et le public. Et accessoirement, de créer des conditions idéales pour les captations, comme vous pourrez le constater vous-même en regardant les vidéos associées à cet article. Les caméras sont en effet installées en hauteur, à quelques mètres de la scène. Le confort de tournage est encore accru par l’accueil chaleureux, serviable et efficace de l’équipe technique (Pour écouter quelques enregistrements de ce concert, cliquez sur les liens en bas de cet article).
Le concert commença donc, à peu près à l’heure, devant une audience assez fournie de danseurs, dont la présence joyeuse en face de la scène encourageait les artistes à donner le meilleur d’eux-mêmes. Rey Cabrera trônait assis, la guitare à la main devant ses musiciens, imperturbable, hiératique, avec sur son visage rond et boucané un imperceptible sourire qui le faisait un peu ressembler à un sphinx. Il nous interpréta un répertoire de Son à la sonorité très traditionnelle, bien ancrée dans la terre et dans le rythme, avec des solos de trompette, de piano et de tres capables de réveiller un paralytique. Une musique à la fois sans prétention, terriblement dansante, et originale, puisque la plupart des morceaux ne sont pas des reprises de thèmes existants, mais des compositions de Rey Cabrera lui-même. Des compositions d’ailleurs de très bonne facture malgré leur simplicité apparente, et dont plusieurs seraient parfaitement digne d’être intégrées d’emblée dans le noyau du répertoire traditionnel, suivant l’exemple du récent mais déjà intemporel Chan Chan de Compay Segundo.
Une présence scénique forte et tranquille, sans aucune trace d’histrionisme ; une relation simple et amicale avec le public, des compositions de valeur, des interprètes de grande qualité, un mélange d’immense professionnalisme et de décontraction bonhomme : tranquillement assis sur sa chaise, Rey Cabrera son chante la poésie des collines de Santiago, avec ses guateke (petits restaurants), ses bohios (petite chaumière), sa récolte de café, ses bons plats de viande mijotée, les jolis yeux de la fille du voisin…
Un monde mythique, disparu, réinventé par un compositeur moderne en mal de couleur locale ? Pas du tout. Ce monde, c’est celui de l’enfance de Rey, né en 1943 dans une famille de paysans pauvres des environs de Santiago. Et c’est de ce monde pas encore complètement disparu (on peut encore entendre aujourd’hui, au lever du jour, des marchands ambulants chanter leurs pregones dans les rues de la vieille ville de Santiago) dont il m’a parlé lors des entretiens qu’il a bien voulu m’accorder.
L’enfant-musicien : des collines de San Luis au port de Santiago
« Mon père vivait dans les collines autour de Santiago, dans un lieu appelé Los chivos, près du village de Dos Caminos de San Luis. Il était paysan, il cultivait le café et la canne à sucre. Nous étions une famille pauvre, même s’il était propriétaire de sa terre : un lopin de terre, avec quelques animaux, des yucas et des goyaves. Il travaillait aussi pour des plus grands propriétaires.
Notre famille avait 11 enfants. J’étais l’un des plus jeunes. Nous travaillions tous dans les champs avec mon père, avec des bœufs et des machettes. A 4 ans je travaillais déjà dans les champs.
Mon père aimait la musique et jouait du tres, et mes frères aînés aussi. Ils avaient formé un groupe musical, Los complacientes, et, en fin de semaine, le soir, pour un anniversaire, pour les cérémonies de la Santeria ou du Bembé, ils allaient jouer chez les voisins. Mais je suis le seul à avoir suivi une carrière musicale professionnelle.
J’étais doué pour la musique et j’ai été intégré très jeune dans le groupe Flor de oriente. Mes frères m’emmenaient avec eux à la ville en cachette pour jouer et pouvoir se faire offrir un tonneau de rhum. Une fois, nous sommes allés à Guantanamo pour passer une sorte de radio Crochet. Mais mon père s’en est aperçu et a été très fâché.
Mon père était très ami avec le papa d’Eliades Ochoa, qui habitait du côté de Mayari. Ils se sont rencontrés parce que sa sœur était notre voisine. Le père d’Eliades a vu que j’étais doué pour la musique et m’a emmené à Santiago lorsque j’avais 14 ans. C’est là que j’ai commencé à jouer dans la rue, avec Eliades. C’était dans le quartier des prostituées, du côté de Alameda, de Baracones (photo ci-contre). Il y avait beaucoup de cafés, de musique… Nous jouions ensemble pour qu’on nous donne des pourboires. Nous vendions aussi des fleurs. Je faisais les chœurs, la second voix, et Eliades faisant la voix principale. Parfois, nous nous chamaillions, car il voulait être toujours le premier. Il a toujours été leader partout. On se séparait et puis on revenait ensemble. Je jouais aussi avec le groupe Los populares.
Une jeunesse sous la révolution
Ma famille a été pauvre sous Batista, mais elle est restée tout aussi pauvre après la Révolution. Sous Batista, chaque famille pauvre recevait un cadeau de Noël, la Cena de Navidad, mais cela a disparu après l’arrivée au pouvoir des castristes. Quand Fidel est arrivé, il a exigé qu’on apprenne à lire et à écrire. Je savais lire, mais Maria, la sœur d’Eliades (photo ci-contre), ne savait pas, et c’est à ce moment-là qu‘elle a appris. Les musiciens ont dû passer des examens pour obtenir leur diplôme professionnel et exercer légalement. Mais nous, avec Eliades, nous avions toujours joué de la musique spontanément. Nous sommes allés à l’école de musique, mais nous n’aimions pas cela car nous savions déjà plein de choses d’oreille. Nous avions envie de gagner de l‘argent, pas d’aller à l’école. Alors, le professeur nous a dit : « Si vous êtes aussi mauvaises têtes, on va vous renvoyer de l’école ». Nous avons été renvoyés, et nous avons dû faire à la place une sorte de service civil. Nous travaillions toujours dans une école de musique, mais pas comme musiciens. Nous faisions de petits travaux. Par exemple, avons été facteurs pour un théâtre. Mais rien n’a duré longtemps, car ni moi ni Eliades n’avions de discipline. Un jour nous étions en train de distribuer du courrier à bicyclette. Eliades conduisait, moi assis derrière. Nous sommes tombés, et tout le courrier était par terre. Alors ils nous ont retiré ce travail.
J’ai ensuite abandonné la musique et je suis parti vivre de nouveau avec mes parents à la campagne. Puis je suis rentré dans l’armée pendant quelques années.
Pendant la révolution, Raoul Castro avait un camp avec ses troupes près de la maison de mon papa. Je les regardais revenir des combats en me cachant dans un arbre. Alors j’ai compris qu’en me faisant enrôler dans l’armée, j’aurais un petit salaire et à manger. Je me suis donc engagé après la Révolution. J’ai alors suivi une formation militaire avec une discipline très dure. Je suis parti avec mon bataillon vers la région de la Havane. Je me suis même battu dans la baie des Cochons, où mon unité a abattu un avion américain que l’on peut encore voir au musée là-bas. Cela a duré 3 ou 4 ans, et pendant tout ce temps, je n’ai pas eu la possibilité de jouer de la musique.
Puis j’ai quitté l’armée, car j’étais malade et je suis rentré à la maison pour me faire soigner par ma mère. A vrai dire, je n’ai demandé à personne l’autorisation de m’en aller, mais ils ne sont jamais venus me chercher.
J’ai alors repris la musique dans le groupe aficionado Los Populares de San Luis entre 1962 et 1967. Je jouais alors de la guitare électrique.
Musicien professionnel à Santiago de Cuba : l’aventure de Trincheria agraria
Je suis aussi allé à Santiago retravailler avec Eliades dans un groupe non homologué qu’il dirigeait et qui s’appelait Trinchera agraria. Nous allions jouer à la Casa de la trova et pour des émissions de radio. Puis, en 1968, j’ai finalement passé le diplôme de musicien professionnel (photo ci-contre, avec Eliades, de dos).
L’orchestre Trinchera Agraria animait un programme du même nom pour la Radio CMKC et un autre pour Radio Mambi, qui s’appelait Ecos de Nuestra agricultura. Nous devions jouer tous les jours pour être payés. Nous n’avons pas gardé d’enregistrements ni de photos de cette période, mais on voit quelques scènes dans un documentaire d’Yves Billon où nous jouons dans un hospice pour gens âgés.
Au cours de l’émission de radio Trinchera Agraria, j’ai accompagné de grands interprètes, comme Maria Ochoa, Ofelia Suarez, Ramon Galobos, Sita Cuba, Isabelita Perez, ainsi que les poètes Rey Costafreda et Luis Bello.
Les programmes Trinchera agraria et Ecos de Nuestra agricultura était très écouté par des gens de la campagne. Ils pensaient que j’étais poète et parfois ils m’appelaient pour que je chante in vivo une chanson pour une voisine ou une fille dont ils étaient amoureux. Mais en fait je ne savais pas écrire les paroles et j’ai demandé à Rey Costafreda qu’il m’écrive des décimas.
Avec Eliades, nous avons beaucoup travaillé pour le programme de Trincheria Agraria. Puis il a quitté cet orchestre pour rejoindre Cuarteto Patria et je suis devenu directeur de ce groupe. Nos chemins se sont donc un peu séparés à ce moment, mais nous sommes restés très amis. Quand Eliades est venu en Belgique avec le Buena Vista Social Club, il nous a appelés et nous avons fait un grand diner avec lui (photo ci-contre).
J’animais aussi une émission en « live » à la télévision de Santiago, Tele rebelde, qui s’appelait Rumores de la campina. Celle-ci était aussi reprise dans l’émission de la télévision nationale Palmas y caña tous les dimanches soirs. J’ai accompagné à cette occasion beaucoup de grands chanteurs cubains, qui venaient de la Havane à Santiago pour faire les enregistrements : Celina Gonzales, au tempérament très fort et très gai, Gigero de Cienfuegos, Martica Moregon, Ramon Velos, le Quarteto Los Sakras… Cette période a été très heureuse pour moi.
Tout cela a duré pendant une dizaine d’années, jusqu’à la seconde moitié de la décennie soixante-dix. Puis je suis parti me battre en Angola, et je suis revenu à Santiago en 1976. J’ai alors recommencé mes programmes radio, je me suis marié et j’ai intégré le Trio Oriente, dont faisaient partie Fausto (guitare, voix principale), Rafael (guitare d’accompagnement, voix seconde) et moi-même (troisième voix, première guitare). Nous jouions dans différents hôtels : Balcon del Caribe (dans le quartier Versailles), Buccanero, ainsi que dans des restaurants, comme la Parillada de Vista Alegre. J’ai aussi travaillé à l’hôtel Daiquiri, dans la périphérie de Santiago, en même temps que Compay Segundo. Il jouait dans un groupe et moi dans un autre, qui s’appelait le Cuarteto Daiquiri (photo ci-contre).
Il y avait déjà quelques touristes étrangers, mais pas beaucoup. Les musiciens qui travaillaient comme moi pour Cubanacan (l’organisation cubaine du tourisme) avaient un peu plus de possibilités que les autres, mais ils n’avaient pas le droit de recevoir directement des pourboires.
Un jour, à l’hôtel de Las palmas, nous jouions une chanson qui s’appelait Piense en mi. Et, devant nous, deux dames se sont mises à pleurer. On leur a demandé pourquoi. Elles ont dit que c’était à cause de la chanson, qui les rendait très tristes. Alors nous leur avons chanté une chanson gaie et nous avons pris une bière avec elles pour qu’elles d’arrêtent de pleurer et qu’elles oublient.
Au cours de ces années, j’ai bien connu de très grand musiciens, comme ñico Saquito, Adalberto Alvarez, Omara Portuondo (photo ci-dessus), on encore l’orchestre Buena Vista Social Club, dont j’ai accompagné de nombreux musiciens dans le programme Rumores de la campiña.
J’ai beaucoup joué à la Casa de la Trova, avec la Vieja Trova Santiaguera et d’autres musiciens, comme Eliades Ochoa, Felix Dima, Alejandro Almenares, le trompettiste El Paisan. Nous faisions souvent des descargas. Un jour, au début des années 1990, on nous a demandé de venir jouer pour une fête dans un guateke (restaurant) de Puerto Boniato. Mais nous avons bu tout le cachet qu’on nous avait donné. Alors, nous avons dû faire à pied les 20 kilomètres du retour. Heureusement qu’une charrette nous a pris en cours de route !!!
Au cours des années 1990, j’ai commencé à travailler comme chauffeur, au Ministère provincial de l’éducation. Et, à la même époque, je jouais dans le groupe de Maria Ochoa, Corazon de Son (photo ci-dessous). Maria est une très bonne chanteuse du genre campesino, avec un style un peu semblable à celui de Celina Gonzales.
L’installation en Europe et la formation du septet Rey Cabrera y sus amigos
Nous faisions des tournées en Europe avec Maria Ochoa. A l’occasion d’un passage en Belgique, au mois de mai 2002, j’ai rencontré Lydia, puis je suis revenu en tournée en France au mois de septembre. Je suis alors resté en Europe, j’ai rassemblé mes papiers, puis nous nous sommes mariés à Santiago en 2003. Lorsque qu’elle est arrivée là-bas, ils avaient mis tous ses bagages dans une belle voiture pour touristes. Mais quand ils se sont aperçus qu’elle était avec Maria et moi, ils l’ont mise avec nous dans une vieille Lada pour cubains.
Quand je suis arrivé en Europe, j’ai cherché des musiciens pour jouer avec moi. J’ai d’abord rencontré un guitariste et bassiste, Humberto Gonzalez, avec lequel j’ai formé un duo. Humberto avait un cousin, un jeune trompettiste qui habitait à Cienfuegos, Rubén Hernandéz. Nous l’avons aidé à faire venir Rubén, qui est arrivé en novembre 2005 et a tout de suite fait son premier concert avec le groupe. Il a ensuite fréquenté le conservatoire de jazz de Bruxelles. Puis le septet s’est constitué avec l’arrivée d’autres musiciens, comme le pianiste Andrés Fernández « El paisan ».
Le compositeur et son oeuvre
Beaucoup de titres de mon répertoire sont autobiographiques, comme El bohío de Rey Cabrera (qui parle de ma maison dans les collines), La luz de mi corazón (écrit pour Lydia), Camilla (une chanson écrite pour la petite-fille de Lydia, Camilla), Me voy a recoger café (dans mon enfance, je semais et récoltais le café), Canto a Bruselas (un Danzon en l’honneur de ma nouvelle ville d’adoption où je vis depuis 2003). J’écris à la fois la musique et les paroles, comme dans Mi prieta azucarada.
J’interprète aussi des thèmes d’autres musiciens, comme El Guateke de Don Tomas, écrit par Angel Villavicencio, du groupe Guitaras y trovadores.
J’ai déjà publié deux CD en Europe, Color Cuba en 2007 et Cubel Son en 2011. Mon nouveau CD, Controversia, a été inauguré à Bruges le 5 octobre dernier.
Propos recueillis par Fabrice Hatem
Ecouter Rey Cabrera
Rey Cabrera nous propose dans ses CD Cubel Son (2011) et Controversia (2013) un florilège de la musique de l’oriente cubain dans (presque) tous ses états : Son (El guateke de Don Tomas, El bohio de Rey Cabrera, Quien sabe, Ivon, Merci beaucoup, Mi prieta azucarada, Guateke criollo, El cochero, Me voy a recoger cafe,Mi niña mari, Los refrancitos, Le Canto al palenque, El Canto al Sol), Son-boleros (La luz de mi corazon), Changüi (Changüi Mundial, El Yatera), Cha cha cha (Camilla) Fuki Fuki[1] (El Fuiki Fuiki) Danzon (Canto a Brusselas), Bolero-Cha (Pot pourri), avec aussi des reflets de Rumba (Los Testigos, La Calabaza).
Ces thèmes sont écrits et interprétés dans une facture musicale simple et solide, fidèle à la tradition, avec de jolies mélodies bien marquée rythmiquement et le plus souvent très entraînantes pour la danse, qu’il s’agisse des tempos endiablés du Son ou de la voluptueuse langueur du Boléro et du Danzon.
Les paroles, presque naïves, nous font rêver de l’Oriente et de Santiago, en évoquant, avec gouaille ou nostalgie selon les cas, mille petites situations de la vie quotidienne : bons repas dans des bouis-bouis accueillants, amourettes heureuses ou malheureuses, personnages familiers ou picaresques, anecdotes burlesques ou touchantes… Quel miracle que tant de poésie puisse émaner d’un propos aussi simple !!!
Le talent des instrumentistes éblouit à chaque mesure : transparence presque cristalline de la section des percussions qui permet de distinguer clairement chaque instrument ; qualité des solos éclatants de trompette, des improvisations de piano aux reflets très jazzy et de celles, plus traditionnelles mais étincellantes, du tres de Rey Cabrera ; échanges haletants entre soliste et chœurs dans des montunos à l’énergie tourbillonnante.
Ces grandes qualités sont particulièrement marquées dans les enregistrements en « live » : L’orchestre de Rey Cabrera se nourrit alors – suivant en cela la grande tradition de la musique cubaine et tout particulièrement santiaguera – de la forte interaction qui se noue entre musiciens, public et danseurs, dans un échange d’énergie à somme positive ou chaque protagoniste restitue à l’autre davantage qu’il n’a absorbé.
Les musiciens du septeto « Rey Cabrera y sus amigos »
Tres et chant : Rey Cabrera
Piano : Andres Fernandez « El Paisan »
Trompette : Rubén Hernandéz
Bongo, timballes : Gilberto Quevedo
Congas : Amel Serra
Percussions mineures et chœur : Renato Mora
Basse : Humberto Gonzalez ou Dennis Nicles
Le CD Controversiasera bientôt en vente sur i-tunes à partir du 10 décembre et dans les bacs à partir de janvier 2014. Sinon, contacter par e-mail : lydiarey230103@yahoo.fr
Prochaines dates de concerts en Belgique :
23/11/2013 : Concert de Rey Cabrera, Watermael Boitsfort
06/12/2013 : Concert du trio Rey Cabrera, Ogenblik Haren
18/12/2013 : Présentation du film-documentaire « Gol de Cuba », musique de Rey Cabrera, Roma Anvers.
7/02/2014 : Présentation du CD Controversia à Bruxelles, avec la présence de nombreux musiciens, au Théâtre Molière (Muziekpublique) avec une after-party au Midi-Station (place Victor Hortal).
21/02/2014 : soirée Haïti, Roma Anvers
03/05/2014 : Mayito Rivero & Rey Cabrera, Roma Anvers
Quelques titres à écouter sur Youtube :
Me voy a recoger Café
https://www.youtube.com/watch?v=f3Ai1eZXZVI
El guateke de Don Tomas
https://www.youtube.com/watch?v=vwjWFJrGVE4
El bohío de Rey Cabrera
https://www.youtube.com/watch?v=7WV244b5LX0
———————————————————————–
[1] Forme de Son pratiquée dans l’île de la jeunesse
Le groupe parisien Kabiocile, créé et dirigé par le trompettiste cubain Alexander Batte, vient de sortir son premier CD, El Niche la Lleva. Il nous y propose une musique assez nettement ancrée dans le style Timba, mais plus romantique, moins âpre et plus métissée que celle à laquelle nous ont habitué les groupes actuels les plus emblématiques de la Havane, comme Habana d’Primera ou Los Van Van.
Rares sont en effet les morceaux de l’album où ne se glisse pas une référence appuyée à d’autres styles aux sonorités très variées : Jazz funk, Afro-cubain, Reggae, Feeling, Son, Salsa romantique, Chachacha… Kabiocile nous invite ainsi à un vaste parcours musical à travers les styles musicaux des caraïbes et du nouveau monde, qui prend le risque de désorienter un public conservateur habitué aux délimitations figées, mais qui m’a séduit par ses sonorités originales et toniques.
J’ai réalisé pour FC.net un reportage sur ce groupe et son fondateur, que je vous propose de découvrir en cliquant sur le lien suivant : Kabiocile.
Bonne lecture et bonne écoute !!!
Fabrice Hatem
J’ai profité de cette occasion pour demander à Madeline Rodriguez, organisatrice de Cubanyando, de me mettre en contact avec cet artiste. Je l’ai avidement interviewé pour Fiestacubana sur l’histoire de la famille Aspirina à laquelle il appartient, sur sa jeunesse dans le quartier de Guanabacoa, sur son rôle dans la reconnaissance des traditions Afro-cubaines comme phénomène culturel majeur.
Je vous livre ici la teneur de ces entretiens, complétés par quelques recherches sur le web et auprès de mes amis cubains. Bonne lecture !! Mais surtout, ne manquez sous aucun pretexte l’occasion qui vous est donnée de rencontrer en France cette légende vivante de la culture populaire cubaine !!
Pour consulter cet article, cliquez sur le lien suivant : Chacon
A la veille quasiment de leur débarquement en France, les Suédois sont de retour avec, en toile de fond, un second album qui promet… Car le groupe scandinave a une marque de fabrique qui ne laisse personne indifférent. Si Timbalero se souvient qu’à la première écoute (et grâce à lui) de la maquette de « Con Fuerza », j’étais dérouté, je ne le suis pas resté longtemps… La Calle Real casse les codes de la Timba pour nous procurer une musique exceptionnelle… Bordeaux et Paris n’ont qu’à bien se tenir, mais on sait aussi que la France sait accueillir les talents… Patricio, le directeur de la Calle Real se confie aux lecteurs de WWW.FIESTACUBANA.NET avec exubérance et sensibilité…
1/ JACK EL CALVO: cher Patricio, merci de donner un peu de ton précieux temps à www.fiestacubana.net . A la fin de cette semaine, tu donnes deux concerts en France. Enfin la Calle Real est de retour ! Raconte-moi quels sont tes souvenirs de tes concerts en France en 2007 ? Tes impressions ?
PATRICIO: salut Jack et merci pour cette interview. Oui, c’est vrai nous sommes finalement de retour avec une série de nouvelles chansons également.
A ce moment précis, je regarde un des prix décernés par www.fiestacubana.net que je tiens d’ailleurs dans mes mains. Et oui nous avons été récompensés par deux fois : un pour le « meilleur album salsa de l’année 2006 » et l’autre pour « la meilleure découverte de l’année 2006 ». J’en garde un à la maison et l’autre dans notre studio de répetitions.
Je ne peux m’empêcher de décocher un grand sourire quand j’y repense…
Le public, l’écoute, les fans, les mains, tous ces visages heureux, toute cette hystérie quand nous avons reçu ces prix, quand le public chantait nos chansons par coeur, breaks inclus ! C’était une belle et chaleureuse expérience à laquelle aucun d’entre nous n’était préparé !
En fait, je pense que le travail fourni par www.fiestacubana.net ou www.timba.com pour promouvoir la Timba est absolument essentiel si nous voulons écouter plus de timba dans le futur.
Le monde manque de « forums » où les artistes Timba sont reconnus pour leur travail et crois moi, en tant que musicien et auteur, recevoir cette tangible reconnaissance nous aide beaucoup.
2/ JACK EL CALVO: votre premier disque « Con fuerza » (2005 ou 2006) a été un véritable cyclone dans le panorama de la salsa.
Vous nous avez sorti d’une certaine routine en cassant certains codes. Vous nous avez offert une véritable bouffée d’air frais. Je peux te dire que le public a été immédiatement sensible à votre musique. Selon toi, quelle est la recette de la réussite de CALLE REAL?
PATRICIO: Jack, je m’incline et te remercie devant ces mots qui me touchent.
Tu ne sais pas à quel point je suis curieux de savoir quels sont les codes que nous avons cassés ! Alors dis-moi stp ! Il est évidemment important pour moi de comprendre comment nous sommes perçus. Très souvent, nous ne sommes pas forcément les meilleurs pour décrire notre propre travail et trouver les bons mots est plutôt difficile. C’est pour cela que la perception extérieure des gens peut nous aider. C’est une réelle benediction que le public ait été si sensible à notre musique et que notre musique puisse s’exposer à leurs oreilles, leurs coeurs et leurs âmes. Nous nous étonnons toujours d’avoir des fans. C’est comme avoir un bon ami dont tu réalises soudain l’importance. Tu te sens alors un peu dépassé par cette émotion pendant un court instant. Puis la vie reprend son cours et la « normalité » reprend le dessus. C’est ce que nous ressentons à propos de notre public.
Peut-être est-ce cela que le public ressent et entend; du moins je l’espère !
La recette du succès de Calle Real doit être l’ardeur au travail, beaucoup de compromis et la passion.
La version courte : l’idée de la Calle Real est née lorsque j’ai décidé de jouer plus sérieusement de la musique et non plus comme un simple hobby. J’ai découvert plus tard que des amis partageaient le même désir. Nous avons donc fait un essai et cela a très bien fonctionné dès le premier coup. En prenant soin de ce « momentum », nous nous sommes progressivement développés musicalement et quantitativement pour tenter de recréer le « nouveau » son de l’île de Cuba, à l’époque majoritairement du Son.
Mais étant Suédois, nous ne pouvions ni être Cubains, ni jouer comme des Cubains. Nous avons donc créé notre propre style tout en respectant certains codes cubains. Notre sonorité d’aujourd’hui est le fruit de plusieurs années de travail et reste en constante évolution. Au départ, notre musique s’assimilait plutôt à du Son classique, puis elle a progressivement évolué vers une Timba plus actuelle.
Au depart; il nous fallait faire fonctionner la section rythmique. Puis il nous a fallu trouver un nouveau guitariste. C’est à ce moment là que Gunnar Thullberg (piano et guitare) est entré dans le groupe. Nous avons ensuite pensé à des cuivres et Petter Linde (trompette) a intégré l’équipe pour faire à lui tout seul une section de cuivres ! Il a été seul pendant presque deux ans avant que Karl » Kalle » Frid (maintenant au chant et au guiro, puis au trombone) ne le rejoigne. Rickard et le premier bassiste sont partis à Cuba pour 6 mois.
A ce moment là, Harry Wallin (batterie et timbales) est arrivé. Après leur retour, le bassiste a quitté le groupe et nous avions une « machine » totalement fonctionnelle et prometteuse mais sans bassiste. Nous avons ainsi trouvé Andreas Unge (actuel bassiste).
<Patricio Sobrado, directeur de Calle Real
J’ai toujours eu cette touche de mélancolie dans mon humeur, alors comme une sorte de tuteur la première écoute du disque de Buena Vista Social Club m’a redonné l’esprit et la vibration de la musique de mon enfance. Alors je pense que mon coeur était déjà largement ouvert à cette musique en rapport aux anciens grooves et aux mélodies mélancoliques.
En m’y intéressant de plus près, j’ai découvert un secret jusque là incompréhensible pour moi : il n’est pas contradictoire d’interpréter des histoires tristes et des chansons mélancoliques de manière joviale et dansante !! C’était juste un autre emballage mais le message était bel et bien là : il contenait beaucoup de passion, d’histoires d’un amour meilleur et de destin.
Je crois que c’est à ce moment là que je me suis réellement fait accrocher.
J’ai été à Cuba 6 ou 7 fois et bien sûr quand j’ai commencé à jouer, j’ai pris des cours avec de grands professeurs cubains de Tres comme Cesar Lozada (tresero of Los Jovenes Clásicos del Son). C’est plus précisément lors de mon 3ème voyage à Cuba que j’ai commencé à jouer du Tres. Mais j’ai surtout appris par moi-même sur le tas en pratiquant, en cherchant ce qui était faisable…Et je découvre encore beaucoup de choses aujourd’hui, c’est comme un processus interminable.
La musique possède de multiples facettes qu’il nous faut sans cesse explorer dans l’objectif de devenir meilleur musicien. Du coup, j’essaie aujourd’hui de me tenir au courant et d’être à jour sur tout ce qui touche à la théorie musicale afin de comprendre plus de choses. Le piano est un instrument extraordinaire pour écrire des chansons et j’utilise pratiquement la même approche avec les autres instruments.
La Timba demande beaucoup de rigueur pour n’importe quel musicien. C’est une musique basée sur un groove métronomique et qui se joue avec une précision au millième de seconde. Cela demande un travail d’équipe qui suscite un échange de modèles rythmiques et mélodiques entre les différentes sections d’un orchestre à travers principalement des arrangements ouverts. Mais cela reste principalement un « voyage » en énergie.
Pour moi dans la musique tout est notion d’énergie. Si tu dois écrire une chanson, il s’agit de savoir comment et où tu la positionnes (l’énergie) comment tu l’exhortes, comment tu joues avec, comment elle te surpasse ou comment elle t’explose.
Tu peux toujours analyser un effort simple de cette perspective d’énergie et tu commenceras à voir d’intéressants modèles, pourquoi tel ou tel détail etc…
Pour ma part, le Tres a une simplicité par ses 3 paires de cordes. Mais en même temps c’est un instrument exigeant. Il est très rythmique comme la plupart des instruments utilisés en Timba. On peut utiliser le Tres dans des formations réduites de 2 ou 3 musiciens, comme dans des formations plus grandes. L’instrument joue alors un rôle différent, il est donc à mon avis un instrument versatile.
Il est vrai aujourd’hui que Rickard est un véritable passionné et fanatique de Timba…Il a une collection impressionante de disques et de DVD à vous faire envier et il apporte comme personne d’autres dans le groupe de l’énergie et des idées. Cependant, il n’est pas si impliqué que cela dans l’écriture même de nos titres.
Tous les membres du groupe, exceptés Rickard et moi même; sont des musiciens qui ont été formés en écoles et qui ont étudié pendant de nombreuses années. Et seule la moitié du groupe a passé un temps de sa formation à Cuba, sorte d’année de specialisation…La plupart de nous tous avons appris sur le tas en écoutant, en pratiquant, en recherchant…C’est définitivement la meilleure école.
7/ JACK: quelles sont vos influences musicales ? Cubaines et/ou autres ?
PATRICIO: bien sûr que nous sommes influencés par de nombreux artistes de la scène de la Timba, mais nous nous inspirons aussi d’artistes issus d’autres genres musicaux.
Pour ne citer que quelques uns des groupes de Timba que nous préférons : Los Van Van, Pupy, Dan Den, NG la Banda, Elito Revé, Manolito y su Trabuco, Manolin el Medico, Pedro Pablo, La Charanga Habanera, Paulito, Isaac Delgado, Irakere, Maikel Blanco y su Salsa Mayor, Michel Maza, Bamboleo, Azucar Negra, Haila et les tout derniers que j’oublie de mentionner…
Chaque membre du groupe a ses préférences… donc si vous posez à l’un d’eux la même question, il est fort probable qu’il vous cite ces noms dans un ordre différent et peut être même qu’il en rajoute!
Certains d’entre nous préfèrent le groove du Songo, d’autres préfèrent celui de la Timba. La Calle Real est un petit peu un mélange des 2.
Nous écoutons aussi beaucoup de musique cubaine traditionnelle étant donné que nous avons presque tous aussi joué dans différents groupes de Son (modeste petit plus). Je veux bien sûr parler ici d’Ibrahim Ferrer, Omara Portuondo, Guillermo Portabales, Compay Segundo, Trio Matamoros, Septeto Mayor, Cachaito et beaucoup d’autres.
Mais je dois avouer que notre inspiration majeure vient du Jazz (à la fois classique et contemporain), de la Jazz Fusion pour certains d’entre nous, et du Jazz Hardcore pour d’autres. Plus de la moitié des membres du groupe sont issus d’une formation jazz et ont en joué pendant de nombreuses années.
Le Pop Rock et les hits actuels, font également partie de nos influences puisque certains d’entre nous font aussi de la pop music et en vivent.
Pour résumer, je dirais que la Calle Real est un melting pot, un mix d’influences de la musique contemporaine avec le vocabulaire de la Timba pour l’exprimer.
8/ JACK: quelle musique as-tu de chargée dans ton lecteur MP3 au jour d’aujourd’hui ?
Quel genre de musique as-tu l’habitude d’écouter ?
PATRICIO: et bien, en ce moment pour être honnête, j’écoute beaucoup les titres du futur album de la Calle Real, étant donné que nous sommes en plein enregistrement.
Sinon, en temps normal, j’ai plutôt l’habitude d’écouter de la Soul : Stevie Wonder, D’Angelo, Amp Fiddler, Donny Hathaway… Tout dépend de mon humeur !
9/ JACK: bon; Patricio, parle nous de ton futur album ! Tout le monde l’attend impatiemment! J’ai entendu 2 nouveaux titres en live plutôt impressionnants: « ABREME LA PUERTA » et « NO ME DIGAS QUE NO ». Ces 2 titres vont-ils figurer sur le nouvel album ? Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus : le titre du nouvel album, sa date de sortie…etc ?
PATRICIO: c’est exact, nous sommes en train de travailler sur notre nouvel album et je dirais qu’il est pratiquement fini. Il reste encore quelques details post-production à affiner avant le mix final. Si tout va bien le master du CD devrait être prêt vers Février. A partir de là, il faudra compter quelques mois avant qu’il ne soit commercialisé sur le marché. L’affaire n’est pas encore tout à fait conclue donc à suivre…J’aimerais pouvoir vous donner une date exacte de sortie mais je ne peux vraiment pas pour le moment.
Disons qu’en ce qui me concerne; je prévois une sortie si tout va bien pour le Printemps 2009. Mais cela reste du domaine de l’hypothèse.
Pour répondre à ta question, oui les titres que tu as mentionnés figureront sur notre prochain album. En fait, un enregistrement pirate d’une de nos représentations sur scène à un festival Salsa au Venezuela, circule à travers le monde et a même figuré récemment au top ten du hit parade de DJ Melao sur Timba.com.
Je trouve ca assez marrant parce que moi même je ne suis pas en possession de cet enregistrement. C’est tellement agréable de savoir que les gens aiment tant notre musique au point de s’échanger un enregistrement à travers le monde quand même.
Les titres dont tu parles sont :
« Abreme la puerta » : une chanson sur le fait de revenir trop tard à la maison face à un amour fâché !
« La eternidad del amor » : la chanson parle d’un amour que tu as vécu un temps et qui finalement restera éternel quoiqu’il puisse arriver…
PATRICIO: les problèmes que nous avons rencontrés sont essentiellement financiers et logistiques.
Nous sommes 12, et il a été assez difficile de trouver un créneau commun dans nos agendas respectifs plutôt chargés pour l’enregistrement studio, afin de caler les bases, les voix, les cuivres et les détails de post production…Tout cela demande beaucoup de temps. Et avant tout cela, nos titres devaient être finalisés.
Etant donné que nous n’avons pas de compagnie de disque derrière nous, nous faisons tout par nous mêmes. Nous écrivons toutes nos chansons de manière gratuite et nous nous occupons nous mêmes des arrangements. Thomas et moi avons passé un jour par semaine cette année à écrire les paroles et les mélodies. Gunnar, Karl and Petter ont apporté leur propres contributions aux titres en écrivant les arrangements des cuivres pour Thomas et mes chansons.
Donc au final, une fois l’album finalisé, nous commencons avec un déficit d’environ 10 000 euros. Il s’agit donc ici d’un projet basé purement et simplement sur notre volonté personnelle. Nous espérons simplement pouvoir couvrir cette dette dans les années à venir. Jusque là nous n’y sommes malheureusement pas arrivés mais nous continuons quand même.
11/ JACK: peux-tu nous décrire la place de la Timba en Suède ? Le public est il assez large ? Il existe beaucoup de très bons et incroyables musiciens de Jazz – je pense notamment à Esbjorn Svensson : RIP !- mais aussi de salsa en Suède. Peux-tu exliquer ce phénomène ? Cela vient-il de la formation scolaire ? Existe-t-il des formations spéciales ?
PATRICIO: oui c’est vrai. On trouve beaucoup de bons musiciens de renommée internationale en Suède. Cela est peut être dû aux écoles de musique accessibles à tout le monde dès le plus jeune âge mais aussi à une tradition, un héritage et une curiosité pour les musiques du monde.
Il n’est pas question ici de copier ou faire une musique similaire. Il s’agit plutôt d’une façon d’exprimer un désir ou de raconter une histoire, fruit d’une tradition qui existe depuis des années. Je ne suis pas certain, mais je pense que Stockholm va rester pour un moment le « nid bouillant » de la timba. Cependant, il faut garder cela en perspective.
La Timba n’est pas un courant musical à proprement dit comme la pop, le rock , le hip-hop ou même le reggaeton. La Timba est encore confinée à un sous ensemble culturel.
Donc mes amis musiciens sont obligés de travailler avec des artistes des courants principaux pour subvenir à leurs besoins.
Dans un monde meilleur nous pourrions payer nos charges en jouant de la Timba mais c’est loin d’être le cas aujourd’hui.Je crains que ce ne soit la vérité !
12/ JACK: as tu des connections avec JANNE BOGDAN, de Soneros All Stars, un autre tresero suédois ?!
PATRICIO: oui je connais bien Janne du temps où il dirigeait le groupe Stockholm Soneros à Stockholm. En fait, ce groupe a débuté 2-3 ans avant même que la Calle Real ne soit conçue. Ils ont même été les premiers à surfer sur la vague du Buena Vista Social Club avec succès.
J »ai joué avec presque tous les musiciens de ce groupe qui s’est malheureusement dissout quelques temps après.
Aujourd’hui Janne s’implique dans des projets de production de disques Timba avec des musiciens cubains.
Thomas Sebastian Eby, chanteur
PATRICIO: mon rêve serait de consacrer plus de temps à écrire de la musique au lieu de passer mon temps à trouver un moyen pour payer le loyer.
Mon second rêve serait de pouvoir faire des tournées plus sérieuses. Je pense que public doit avoir la possibilité de découvrir notre musique live.
Nous sommes déjà partis en tournée au Venezuela, à Cuba, en Ethiopie et au Mali ou nous avons eu de très très bons resultats. Je rêve aujourd’hui de pouvoir partir en tournée en Amérique du Sud, aux Etats Unis et en Europe bien sûr.
14/ JACK: est-ce que vous souhaiteriez faire passer un message en particulier à votre public francais et aux lecteurs de www.fiestacubana.net ?
PATRICIO: j’ai hate de vous voir ce week end en France. Nous sommes tous très impatients d’arriver.
Je crois sincèrement que si nos fans de France ont aimé notre 1er album alors ils vont encore plus apprécier le prochain !
Thomas Sebastian Eby a étudié plusieurs années la percussion, notamment au CNSEA à la Havane, Cuba. Il possède un grand sens des arrangements et de la musique dansante. Il a eu une forte influence sur le développement musical du groupe. Même si son intrument principal est la percussion, il est également très demandé pour les vocaux et a tourné avec la plupart des plus grands artistes en Suède. Après 4 années de congas et de vocaux, Thomas a pris le rôle de chanteur principal dans le groupe en 2004. | |
Patricio Sobrado est le directeur du groupe et est l’un des deux qui n’a pas eu de formation musicale ou qui n’est pas issu d’une famille de musiciens. Autodidacte en guitare et tres. Il a été happé par la musique cubaine après plusieurs voyages à Cuba. Armé d’un Masters d’ingénierie Civile du Royal College of Engineering de Stockholm et de plusieurs années d’expérience en tant que chef de projet, il est d’un des fondateurs du groupe en 1999. | |
Gunnar Thullberg est un musicien qui est aussi doué à la guitare qu’au piano. Il a également étudié à la Havane. Sa musicalité est étonnante ce qui fait de lui un des pianistes de salsa les plus recherchés en Scandinavie. Son timing brillant et son groove conduit la section rythmique du groupe. Gunnar a rejoint Calle Real en 2002 en tant que guitariste puis s’est mis au piano quand la direction totale du groupe a été modernisée. A côté de ses études d’économie à l’Université, Gunnar est un musicien freelance qui a joué avec notamment Calixto Oviedo y La Recompensa, Gilito y su clave, La Tremenda, Horace Korn et Hans Solo Super Orchestra. | |
Andreas Unge est probablement connu aujourd’hui comme l’un des bassistes les plus demandés en Europe. Il est également un producteur respecté et participe à l’élaboration de nombreux hits commerciaux pour des artistes européens. Andreas est diplômé du Musikkonservatoriet (Royal Music College) de Copenhague. Il a joué avec Ricky Martin, Christian Waltz et Simone Moreno comme avec des chanteurs suédois comme Robyn, Jennifer Brown, Jessica Folcker et Stephen Simmonds. Andreas a rejoint Calle Real en 2003 et est devenu un pilier de la section rythmique du groupe par sa vertu de la précision et la confiance qu’il donne. Il est un des rares à posséder une Azola Baby bass, typique pour jouer de la Timba. | |
Rickard Valdés est le second du groupe à ne pas avoir une formation musicale. Né et élevé dans une famille musicale légendaire. Son père Bebo Valdes a gagné 5 fois le Grammy. Comme son frère, Chucho Valdés (Irakere), grand joueur de piano Latin Jazz et recompensé de Grammy, l’héritage musical coule dans ses veines. Rickard a rejoint le groupe en 2000 et a commencé par les bongos, puis les timbales et enfin les congas. Mais son instrument principal reste les Timbales. Avec son feeling spécial pour la musique cubaine, il est un des piliers de la section rythmique. Il a joué dans le groupe de son père pendant 8 ans et a participé à la victoire pour le Grammy du meilleur album « Lagrimas Negras » et « Bebo de Cuba ». Aujourd’hui percussionniste freelance , il a déjà joué avec Bebo Valdés, Chucho Valdés, Paquito D´Rivera, Giovanni Hidalgo, Patato Valdés, Juan Pablo Torrés, Francisco Aguabella, Diego Urcola, Michael Mossman, Mario Rivera, Luis Bonilla, Milton Cardona, Joe Gonzales, Pablo Calogero, Steve Berrios, John Benitez, Andy González, Jerry González, Dafnis Prieto, Raul Agraz, Bobby Porcelli, Douglas Purviance, Papo Vázquez, Ray Vega et Alicia Keys. | |
Harry Wallin a étudié la musique plusieurs années dans différentes écoles de Suède. Batteur, il est capable de jouer de la pop, du rock, du R&B, soul, jazz, afro pop et aujourd’hui de la timba. En tant que fils du pianiste de jazz Per Henrik Wallin, Harry a grandit dans un environnement musical et a hérité de dons musicaux. Harry a rejoint la CALLE en 2002 et a commencé à la batterie. Lorsque le groupe s’est développé, Harry s’est mis à la batterie et aux timbales comme il se doit de le faire à Cuba ! Musicien freelance, talentueux est lui aussi très demandé ! |
Jacek, Petter, Magnus, Cezary
Petter Linde, trompettiste, est diplômé de Kungliga Musikhögskolan (The Royal Music College en Suède) en jazz et en musique Afro-Americaine. Petter a intégré le groupe en 2001 et est aujourd’hui en charge de la section de cuivres. Petter arrive aujourd’hui à vivre de la musique grâce à ses participations à plusieurs groupes suédois.
Magnus Wiklund tromboniste suédois. Informations non communiquées. NC.
Cezary Tomaszewski est un tromboniste expérimenté qui a étudié dans plusieurs écoles différentes. Sa sonorité particulière fait de lui un musicien très recherché, collant parfaitement à la musique de la Calle Real qu’il a intégré en 2005. Cezary a joué avec Florence Valentin et La Tremenda.
Karl « Kalle » Frid, tromboniste très talentueux et est sorti d’écoles aussi prestigieuses que The Royal College of Music à Londres et le CNSEA à la Havane, Cuba. Kalle est aussi diplômé de The Royal Music College en Suède? Il a rejoint le groupe en 2003. Au départ, il a créé avec Petter la section de cuivres, pour se metre ensuite aux vocaux et au güiro. Aujourd’hui Kalle est un musicien également très recherché ! |
Commentaires récents